Pays : États-Unis

Années : 2009/1973

Castings : Georges Clooney, Meryl Streep, Jason Schwartzman,…/Brian Bedford, Peter Ustinov, Phil Harris,…

La figure des animaux a toujours été utilisée comme allégorie de l’être humain dans la culture. C’est quelque chose de simple mais pourtant logique : il faut parfois se dissocier de notre statut d’homme pour que les messages passent mieux. Demandez ainsi à George Orwell, Jean de la Fontaine ou Pierre Boulle. C’est bien évidemment le cas dans le cinéma, en particulier celui d’animation. On pourrait parler de « Zootopie », traitant de la manière dont les stéréotypes régissent notre comportement et nos craintes. D’ailleurs, comme les deux films que nous comptons aborder aujourd’hui, l’un des héros est un renard rusé. Néanmoins, nous allons pour l’heure nous concentrer sur le « Robin des bois » de Wolfgang Reitherman et le « Fantastic Mr Fox » de Wes Anderson.

Ces deux films d’animation ont bien évidemment de nombreuses différences. Tout d’abord, leur conception : le premier est un dessin animé alors que l’autre utilise la stop motion pour animer ses personnages. L’un est réalisé par une légende de l’animation (il a réalisé précédemment « Le livre de la jungle » et « Les Aristochats »), l’autre est le premier essai dans ce domaine d’un metteur en scène habitué à colorer ses films live de manière presque animée. Et si le premier a été conçu par un studio encore à la dérive par la mort de son fondateur et n’a acquis son statut de classique qu’au fur et à mesure des années, le second était appuyé par le prestige naissant d’un auteur à l’univers aussi riche que le romancier qu’il adaptait, Roald Dahl. Bref, beaucoup semble opposer les deux longs-métrages, même leur année de sortie.

En effet, trente-six ans séparent les deux longs-métrages, un laps de temps énorme en temps d’innovation technique dans un milieu en constante évolution technologique. Et pourtant, sur la forme, les deux relèvent de la même rigueur et de la même beauté visuelle. Le premier a quand même le désavantage de réutiliser des animations d’anciennes productions précédentes, tout comme d’autres films du studio par ailleurs. Néanmoins, le trait des animateurs reste dynamique et cohérent avec l’univers dépeint et cela s’oublie assez rapidement lors du visionnage du film. Même s’il a été rabaissé à ce niveau comparé à d’autres classiques de Disney, « Robin des bois » n’a pas à rougir de sa qualité visuelle.

Concernant « Fantastic Mr Fox », la stop motion a le risque d’imposer une forme de rigidité des mouvements, ce avec quoi joue Anderson tout en conférant une nouvelle fois une forme de dynamisme avec la rapidité d’action de ses personnages ou encore le mouvement de certains plans. On peut également argumenter que lorsque le réalisateur pose sa caméra, sa composition détaillée de son décor offre de nombreux tableaux, comme ceux pouvant décorer les romans de Dahl. Les deux représentent donc deux faces de l’animation : le premier, un style visuel jugé copié sur ses prédécesseurs mais pourtant remarquable, l’autre un travail de longue haleine profitant des défauts d’un média pour jouer avec celui-ci.

Sur le fond, il est amusant de comparer les réflexions de chacun sur leur milieu économique. Le premier garde les bases des aventures de Robin des bois : la volonté de prendre aux riches afin de rendre aux pauvres. Nous nous trouvons dans une société à priori moyenâgeuse, où le tyran en place profite de sa position pour compenser son sentiment d’infériorité (être moins bien vu que son frère, roi légitime, parti en croisade). Le représentant de la justice, le shérif, est à la solde de celui-ci et lui obéit au doigt et à l’œil. Certains pourraient faire un parallèle avec le monde capitaliste dans lequel on se trouve, mais cela est bien moins important que le message même du film. Robin est le représentant des pauvres, des laissés pour compte, de ceux qui subissent les agissements des puissants. Il est donc la preuve que, pour rendre une société juste, il faut se battre pour que chacun ait les mêmes chances entre ses mains pour faire de sa vie ce qu’il en veut. C’est donc à la société de s’adapter à l’individu pour que chacun puisse subsister avec les mêmes opportunités.

C’est à l’opposé auquel on a droit dans « Fantastic Mr Fox ». Ici, les personnages sont à côté d’entreprises tenues par des êtres humains qui ne veulent évidemment pas laisser l’accès à leurs ressources aux animaux sauvages à proximité. Ces derniers se retrouvent pourtant avec un accès à leurs biens fourni par monsieur Renard. Ses agissements provoquent bien évidemment la colère des humains, qui tentent de s’en débarrasser afin de se venger de la honte de s’être fait chaparder leurs biens par une vulgaire créature. Ici, la figure du renard est un peu plus égoïste dans ses motivations, avec cette envie de revenir à sa vie d’avant, bien plus excitante. Et en même temps, comment ne pas résister à l’envie de mettre en colère des propriétaires qui ne veulent partager leurs richesses avec les autres ? Il faut parfois créer le bazar chez les riches pour améliorer notre monde, mais si cela ne marche pas, il y a toujours un moyen de survivre et de profiter de son existence. Si le final est bien évidemment positif, il peut être vu dans le sens opposé du message de « Robin des bois » : les individus, pour survivre, doivent parfois s’adapter à leur société pour profiter de ce qu’elle a à offrir.

Voici donc décidément deux films d’animation qui méritent grandement le visionnage, amusants pour toute la famille mais offrant également des pistes thématiques qui méritent d’être creusées longuement pour amener à certains débats sur notre société. Ce sont également d’autres preuves qu’en plus que le film d’animation est un genre qui a beaucoup à offrir visuellement et intellectuellement, les métaphores animales pour nous représenter moralement n’ont pas encore fini d’être utilisées dans le domaine de l’art. En même temps, il y aura toujours tellement à dire sur l’être humain, que ce soit en tant qu’individu ou en tant que groupe, qu’il serait impossible de ne pas voir en nous une source intarissable de sujets pour des artistes passionnés et passionnants…


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