LE BONHOMME DE NEIGE
Un accident industriel embarrassant par le réalisateur du culte Morse, qui avait tout pour être un succès. Le thriller, avec Michael Fassbender et Charlotte Gainsbourg, est un désastre d’écriture et de montage qui vicie tous les excellents ingrédients artistiques réunis pour une avalanche d’incongruités.
Réalisateur : Tomas Alfredson
Scénario : Hossein Amini, Peter Straughan et Søren Sveistrup, d’après le roman Le Bonhomme de neige de Jo Nesbø
Direction artistique : Maria Djurkovic
Photographie : Dion Beebe
Montage : Claire Simpson et Thelma Schoonmaker
Musique : Marco Beltrami
Producteurs : Tim Bevan, Eric Fellner, Peter Gustafsson et Robyn Slovo
Acteurs : Charlotte Gainsbourg, Chloë Sevigny, Val Kilmer, James D’Arcy, Michael Fassbender, J.K. Simmons, Rebecca Ferguson
Date de sortie : 29 novembre 2017
Durée : 1h59mn
Lorsque le détective d’une section d’élite enquête sur la disparition d’une victime lors des premières neiges de l’hiver, il craint qu’un serial killer recherché n’ait encore frappé. Avec l’aide d’une brillante recrue, il va tenter d’établir un lien entre des dizaines de cas non élucidés et la brutalité de ce dernier crime afin de mettre un terme à ce fléau, avant la tombée des prochaines neiges.
Bienvenue dans les noirceurs du thriller scandinave. Un véritable genre en soi rendu célèbre par les adaptations de Millénium (d’après Stieg Larson) et le remake de David Fincher, auquel Tomas Alfredson avait largement contribué en réalisant le vampirique et envoûtant Morse, lui-même remaké aux USA par Matt Reeves. Morse était un chef d’oeuvre salué en son temps par la critique mondiale, Snowman, c’est tout le contraire, un navet sévère, conspué par le public et la critique à l’échelle planétaire.
Ici, l’on se base sur le roman éponyme de Jo Nesbø, mettant en scène les enquêtes du sérieusement travaillé du chapeau Harry Hole. Un trou, comme son nom l’indique, que la quantité d’alcool ingurgitée ne vient jamais combler…
C’est Fassbender qui incarne le rôle du flic dépressif. Il a enchaîné les tournages différents ces dernières années, passant de Assassin’s creed aux traumas enneigés du Bonhomme de neige. On l’y voyait davantage à l’aise et, en soi, il ne démérite pas. Après tout, n’est-ce pas un polar un poil pervers, où l’intrigue policière s’insinue dans les failles de personnages perturbés ?
Avec Scorsese comme producteur exécutif (il a été un moment intéressé par la réalisation), Gainsbourg fille en second rôle, ainsi que Val Kilmer ou J.K. Simmons, on pouvait croire au miracle, mais c’était oublier qu’Hollywood est aussi une industrie capable de produire du bon à la chaîne tout en abîmant sur le tapis ses meilleurs éléments.
Après un bide américain alimenté par des critiques vénéneuses, le cinéaste Tomas Alfredson a justifié l’échec artistique du film… Il confesse avoir reçu au fil du tournage des parcelles de script à tourner sans que rien ne se raccorde vraiment lors du montage final. Malheureusement, sa description du processus créatif s’avère vérifiable à l’écran.
L’on part d’une séquence introductive glaçante, d’une effroyable efficacité, durant laquelle un gamin subit la violence abjecte d’un père, puis la mort traumatisante d’une mère, ce qui annonce une véritable claque esthétique et narrative, pour finalement sortir de la salle après avoir essuyé un aboutissement scénaristique paresseux, sans vraie révélation. Tout concordait à faire de l’un des suspects les moins attendus le tueur effectif. C’était tellement facile qu’on se refusait d’y croire…
Mais que se passe-t-il entre-temps ? De grands acteurs sous-employés. Val Kilmer fait une fugace apparition sans que le script tronçonné ne sache trop quoi faire du monument de cinéma qu’il est. Il sera vite écarté de l’intrigue, au gré d’une chronologie chaotique. On citera également le double rôle de Chloë Sevigny qui laisse pantois tant sa peinture est grossière.
J.K. Simmons est lui aussi employé au rabais et apparaît comme une caricature inconséquente des monstres imbus de pouvoir à la Weinstein. Notre Charlotte nationale ne peut que verser des larmes tant son rôle est également illusoire à l’écran. On pourrait même affirmer qu’il s’agit du personnage le plus insipide du film, même si le jeu de la comédienne n’est nullement en cause.
Toute cette constellation de grands noms est rattachée artificiellement à la trame qui devient vraiment paresseuse dans sa résolution, mettant à mal les pistes intéressantes que la première partie semblait vouloir mettre en place, mais qui seront laissées inexploitées.
Bref, cette avalanche de déceptions accouche d’une congère qui finit par nous mettre les boules (de neige, il va sans dire !). The Snowman a déjà fondu avant même le début de l’hiver.
2/10