Pays : États-Unis
Année : 2012
Casting : Kristen Conolly, Fran Kranz, Chris Hemsworth, …

Le concept de « Méta » n’est pas neuf et est devenu extrêmement populaire, que ce soit par Woody Allen adressant ses interrogations à ses spectateurs ou, pour donner un exemple plus récent, « Deadpool ». L’idée d’un quatrième mur qui se doit d’être brisé a trouvé comment subsister de diverses manières. Ici, nous allons aborder un film qui utilise cet aspect d’une manière un peu plus poussée que les autres.

Cinq amis partent pour un week-end dans une cabane en forêt. Ce qu’ils ne savent pas, c’est que leurs gestes sont surveillés par une mystérieuse société…

ATTENTION ! LA CRITIQUE QUI VA SUIVRE DEVANT REVENIR SUR CERTAINS POINTS DU FILM, IL EST RECOMMANDÉ DE L’AVOIR VU AVANT DE LIRE CETTE ANALYSE.

Le cinéma d’horreur a connu un grand exemple de film ayant redonné un aspect plus populaire et financièrement rentable dans les années 90 : « Scream », qui franchira la barre des 100 millions de dollars au box-office. Ce succès économique poussera de nombreuses personnes à reproduire la formule du slasher s’auto-analysant. C’est ainsi que plusieurs productions joueront la carte du clin d’œil au spectateur, cherchant à honorer sa culture du genre tout en s’amusant avec les codes dictés auparavant. Mais, comme souvent, l’augmentation de ces longs-métrages a vu apparaître divers titres creux brandissant la carte du méta de manière publicitaire, amenant à l’écœurement et la saturation. À force d’user et d’abuser de cette technique, cette dernière est passée vers le commun et la normalité. Mais comme toujours, il suffit d’un peu de passion et d’investissement pour ressortir des ingrédients déjà usés afin de rappeler leur goût unique.

Passion et investissement : voici bien des mots pour décrire Joss Whedon et Drew Goddard, co-scénaristes de cette « Cabane dans les bois ». Ils sont d’ailleurs moins dans la déconstruction d’un genre (comparé à « Scream » par rapport aux slashers) qu’à la reconstruction d’une mythologie à part entière : celle du cinéma d’horreur. Les codes utilisés se voient mis en pratique mais avec un regard attachant sur leurs protagonistes (collant à l’interprétation de ceux-ci), qui vont subir une modélisation de leurs vies pour correspondre à la volonté d’une société plus grande et omniprésente. Encore une fois, la violence que provoquera cet écrasement social sera fatale, amenant d’ailleurs à la meilleure scène du film. Divers monstres, utilisés comme de simples outils, se retournent face à leurs « employeurs » avec un sentiment assez étrange pour les spectateurs. Ceux-ci sont en effet partagés entre la mise à mort de certaines personnes que nous avons rencontrées auparavant (même si de manière brève) et l’aspect jouissif de cette séquence, bestiaire complètement fou touchant à divers sous-genres du cinéma de genre. En cela, la séquence de la cave est assez ironique, les personnages devant « choisir » l’horreur par laquelle ils vont périr, de manière à ce que le tout semble « voulu » par nos héros.

Et là arrive le grand intérêt de « La cabane dans les bois » : accepter l’importance des films dans ce domaine dans la société et voir leur structure narrative d’une manière mythologique. La construction d’une œuvre repose souvent sur la même base, mais cela revient à une manière d’expliquer notre monde aux gens, par le biais de récits et de la mémoire mythique (CF le monomythe tel qu’expliqué par Joseph Campbell). Ici, « La cabane dans les bois » reprend à son compte cette forme pour redonner ses lettres d’or à un genre souvent renié par les récompenses et autres formes de reconnaissance et réduit à du divertissement bas de gamme. C’est une grande erreur : le cinéma d’horreur a autant d’importance que n’importe quel autre style cinématographique et, manié avec amour et sincérité, il peut offrir une expérience grandiose et marquant de manière sensitive ses spectateurs. Si Whedon et Goddard tentent surtout de jouer sur l’aspect spectaculaire du genre, ils le font avec assez de passion pour qualifier le résultat de réussite.

On pourrait également déceler une lecture sur l’élaboration de chaque film de genre hollywoodien. Le film raconte ainsi comment une équipe tente d’offrir aux « Dieux Anciens » un sacrifice par le biais de nos protagonistes et de la construction des films d’horreur avec cette volonté d’offrir du sang et du sexe afin de les satisfaire. Ces instants offrent des dialogues tantôt savoureux (« S’ils étaient créatifs, ils ne seraient pas à la maintenance »), tantôt lourds de sens (la réplique sur l’origine des créatures). Le regard jeté à eux est semblable au film entier : avec sincérité et empathie pour ce qu’ils vivent, malgré l’horreur derrière leurs actions. Ce sont avant tout des « fonctionnaires » qui cherchent à sauver la planète (leur société) de personnes à la colère destructive (les spectateurs) et qui subiront les conséquences de leurs actes et échecs dans le sang…

Loin de jouer donc la carte du méta de manière simple, « La cabane dans les bois » dispose d’une envie sincère de réhabiliter le cinéma de genre et son importance, ce qui rend son visionnage divertissant mais en même temps assez passionnant à analyser (plus en profondeur que la critique que vous venez de lire). Si chaque metteur en scène cherchant à briser le quatrième mur le faisait avec tant de respect pour son public et le genre qu’il « déconstruit », cela améliorerait considérablement la qualité des œuvres produites dans cette mouvance…


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