Pays : États-Unis
Année : 1953
Casting : Vincent Price, Phyllis Kirk, Frank Lovejoy,…

Il est devenu commun de taper sur les remakes incessants qui sortent sur nos écrans en permanence. Ceux-ci sont souvent critiqués pour la liberté prise envers l’oeuvre originale ou pour un résultat proche de la copie aseptisée et sans âme. Pourtant, le cinéma a offert de nombreux exemples de relectures réussies. C’est le cas de notre film du jour : « L’homme au masque de cire », réalisé par André de Toth.

Alors qu’il a été gravement blessé dans l’incendie de son ancien musée de cire, un créateur excentrique revient dix ans plus tard exposer de nouvelles statues. Mais ces dernières semblent extrêmement réalistes…

Quand on compare le film avec son prédécesseur, le « Masque de cire » de Michael Curtiz, on constate quelques différences, notamment vis-à-vis de l’héroïne, plus active dans le film de 1933. Néanmoins, André De Toth se réapproprie correctement le long-métrage précédent et y ajoute, en plus d’une mise en scène élégante et des décors travaillés, une version en 3D grâce à un tournage en relief stéréoscopique. C’est un aspect d’autant plus amusant quand l’on sait que le metteur en scène était borgne, ce qui le rendait donc insensible à cet effet. Cet outil ne se remarque pas pour le spectateur le visionnant en format normal, excepté lors de la séquence du Jokari, assez gratuite au premier abord. Mais cette séquence devient plus forte narrativement une fois que l’on regarde le film avec le prisme de la critique du divertissement. Avant de revenir sur ce point, ajoutons que « L’homme au masque de cire » dégage une certaine ambiance gothique, même si elle est loin de celle qu’offrira sept ans plus tard Girogio Ferroni avec son « moulin des supplices », partageant d’ailleurs de nombreux points communs avec le film d’André De Toth.

Plus qu’offrir une oeuvre de genre censé effrayer les spectateurs, De Toth nous donne avec ce film une interrogation sur le statut de créateur dans le milieu culturel actuel. Le personnage incarné par Vincent Price est présenté ainsi dans son premier musée, composé de statues diverses au réalisme saisissant. Mais alors que lui est satisfait de se faire plaisir artistiquement, son mécène tente de lui faire produire une exposition horrifique, bien plus lucrative financièrement. Suite au refus du sculpteur, son musée finit incendié et l’homme blessé. Son retour se conformera alors aux attentes du public mais de manière macabre. On peut alors lire dans le récit qu’en cherchant à conformer les créateurs dans un moule économiquement viable, on transforme ceux-ci en monstres là où la liberté artistique offre une plénitude spirituelle. Quand l’industrie culturelle néglige son but premier (offrir des visions uniques) pour se concentrer uniquement sur ses volontés financières, cela ne peut conduire qu’à la catastrophe humaine. On pourrait également y voir une critique de certains spectateurs qui cherchent sans cesse tellement à se terrifier de manière réaliste que ces derniers seraient prêts à payer pour voir des cadavres frais, mais sans l’admettre au vu du tabou social entourant notre fascination morbide. Le tout est donc emballé dans une fiction de divertissement horrifique, de quoi mettre en abîme son statut.

Presque soixante-cinq ans après sa sortie, cet « Homme au masque de cire » garde un statut intemporel de par sa critique d’une structure culturelle mettant plus en avant sa quête de rentabilité que sa volonté d’offrir au public des oeuvres originales aussi passionnantes visuellement qu’intellectuellement. Quand on se rappelle du remake offert par Jaume Collet-Serra, aussi beau sur la forme (le climax) qu’un peu creux sur le fond, cela rend ce film d’autant plus important à voir, que l’on aime le cinéma de genre ou non…


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