Pays : États-Unis
Année : 1933
Casting : Claude Rains, Gloria Stuart, William Harrigan
Le mythe de l’invisibilité est quelque chose qui a toujours fasciné l’être humain. En effet, le fait de n’être vu par personne permettrait selon beaucoup une plus grande impunité dans nos gestes, aussi bien positifs que négatifs. On regorge ainsi de nombreuses variations de cette croyance mise en valeur par Platon avec l’anneau de Gygès. Tout le monde connaît l’effet de l’anneau unique dans « Le Seigneur des Anneaux » et le « Hollow man » de Paul Verhoeven se forge au fur et à mesure des années une meilleure réputation qu’à sa sortie. Mais le film abordé aujourd’hui est également une excellente variation de ce thème et sera réapproprié dans quelques années par son studio original dans son nouvel univers partagé.

Un scientifique dénommé Jack Griffin arrive à créer un sérum d’invisibilité. Malheureusement, il n’arrive pas à en inverser les effets. Cela va le conduire à adopter un comportement des plus violents…

On parle bien moins de ce film dans la filmographie de James Whale par rapport à son cultissime « Frankenstein », mais cela ne l’empêche guère d’être une remarquable réussite. En seulement 70 minutes, il arrive à aborder pleinement son sujet en le traitant comme un pur film de monstres avec les interrogations morales s’accrochant à ce thème. En effet, la disparition physique semble provoquer une disparition morale, comme si ne plus se sentir rattaché visuellement à notre société autorisait à une déchéance idéologique. Ainsi (comme dans de nombreux films de monstres d’Universal), être exclu de la société et de ses « valeurs » conduit à la destruction desdites valeurs.

Ce qui est encore plus intéressant en comparaison de ses congénères « Universaliens », c’est que Jack Griffin est un être humain et non une créature née avec des aptitudes physiques le rejetant en dehors du monde. C’est par la science que Griffin s’est créé et a muté vers un « monstre » qui commettra notamment des actes de terreur. De quoi rappeler le basculement moral dans lequel chaque être humain peut plonger à tout moment. En effet, on aime parler des personnes qui nous effraient mais il est encore plus effrayant de constater que celles-ci étaient des êtres normaux qui n’étaient pas prédestinées à tuer et semer la panique. C’est quelque chose qui est régulièrement oublié de nos jours : personne n’est voué à devenir un meurtrier ou un terroriste, qu’importe ses origines, sa religion ou son milieu social. Il y a toujours un moyen d’échapper aux facteurs sociaux que l’on juge inévitables de par nos actes. Ce qui est donc un message à la fois effrayant (on ne peut prévoir qui sera un monstre) et rassurant (on peut néanmoins tout faire pour être une personne admirable).

Emballé dans une mise en scène classieuse de la part de Whale et des effets toujours aussi efficaces plus de 80 ans après sa sortie, « L’homme invisible » est donc un classique du cinéma de genre qui se doit d’être vu et revu, que ce soit par son divertissement intemporel ou bien par les réflexions thématiques passionnantes offertes par la manière dont l’intrigue est abordée. Et après, certains diront encore que voir des « vieux » films ne sert à rien…


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