Date de sortie: 17 novembre 1999 (en France)

Durée: 1h30

De Wes Anderson

Avec Jason Schwartzman, Bill Murray, Olivia Williams, Mason Gamble, Luke Wilson,…

Genre: Comédie dramatique

Nationalité: Américain

Musique par Mark Mothersbaugh

 

La mélancolie adolescente

Max Fischer (Jason Schwartzman) est un jeune étudiant de 15 ans à l’école privée Rushmore, école dans laquelle il crée et préside de nombreuses associations. Menacé d’expulsion pour de mauvais résultats, il fait dans cette école des rencontres qui le bouleverseront: Herman Blume (Bill Murray) et Rosemary Cross (Olivia Williams).


Sacré bonhomme du cinéma qu’est Wes Anderson (qui a réalisé Grand Budapest HotelDarjeeling LimitedThe Life Aquatic with Steve Zissou,…) et dont nous critiquons ici son deuxième long-métrage.

Il est très intéressant de remarquer les prémices fondateurs de son style inimitable. Dans Rushmore, Anderson aborde les thèmes de la solitude et de la marginalité des personnages principaux. Avec trois personnages de générations différentes, nous nous trouvons face à un film qui est en mesure de toucher n’importe qui dans son individualité. Cette mélancolie inhérente au film nous pénètre sans que l’on soit préparés, d’autant plus que les personnages y font face froidement et abordent la solitude, la mort et la tristesse d’un ton monotone. Ce trait est caractéristique du cinéma d’Anderson mais il s’affinera au fur et à mesure de ses longs-métrages, et Rushmore est encore un peu brutal dans son approche.

Le film joue en permanence avec nos sentiments puisqu’il a le pouvoir de faire monter les larmes comme de nous faire rire en l’intervalle de 2 minutes. Cela peut clairement déplaire à certains mais dans ce cas-là, le style Andersonien n’est pas fait pour vous. Certes très spéciale, une telle originalité est notable et il est rare d’avoir des réalisateurs avec une patte pareille. Dans Rushmore, il est en résulte que vous finissez totalement déboussolé, tant les séquences s’opposent et se complètent à merveille. De plus, le film contient, étonnamment, de nombreuses séquences qui auraient pu clôturer le film, c’est-à-dire des séquences apportant une conclusion et très puissantes dans le contexte du film. Si cette réalisation aurait pu être maladroite et finir par gâcher la vraie fin, elle donne tout un sens au film d’Anderson qui tente de répondre à divers problème de la vie. Finalement, chacun verra la fin qui l’arrange comme si le film était une thérapie collective qui résout les problèmes de manière manichéenne, un absolutisme qui ne peut que nous faire réfléchir sur nos problèmes personnels.

Rushmore est donc bel et bien une oeuvre qui transcende son cadre. Philosophiquement, nous aurons donc le droit à toute une réflexion sur l’amour, la mort, la réussite, bref, sur la vie. Pourtant, elle transcende aussi le simple cadre du film puisqu’elle constitue pour Anderson un prélude à son film qui sortira 5 ans plus tard: The Life Aquatic with Steve Zissou. Tout d’abord, c’est l’introduction du génialissime Bill Murray dans la filmographie de Wes Anderson puisqu’il apparaîtra désormais dans la quasi-totalité de ses films, mais sera surtout le fameux Steve Zissou de The Life Aquatic. Le personnage torturé, délaissé, qu’il incarne dans Rushmore se retrouvera donc dans le film aquatique. Bill Murray incarne dans les deux films le lien entre la normalité et la marginalité, lien métaphorisé par l’opposition terre/mer. Il sera toujours ce personnage aquatique représentant à lui tout seul la solitude, la tristesse, la mélancolie mais avant tout l’humanité affectable par son environnement, et d’autant plus son environnement social car incarnant un personnage faisant opposition à la froideur inhumaine dont font preuve la majorité des personnages des films d’Anderson. Murray prend donc, dès Rushmore, son rôle de représentant des spectateurs, la passerelle entre la terre et la mer, entre le normalité et la marginalité, entre la réalité et le film.

Toutefois, la ressemblance au film The Life Aquatic with Steve Zissou ne s’arrête pas là: à de nombreux passages de Rushmore sont montrés des levers de rideaux, comme si nous assistions à une représentation théâtrale. Cet élément sera réutilisé puisque le film entier de The Life Aquatic with Steve Zissou sera montré comme l’immense projection d’un documentaire dans un théâtre. Ce milieu théâtral donne en plus à Wes Anderson une justification pour le manque de réalisme de Rushmore, comme pour montrer que ses personnages ne sont que des stéréotypes à l’image des acteurs de la Commedia Dell’Arte, ou encore pour déculpabiliser le spectateur sur ce qu’il ressent afin d’accentuer l’effet cathartique.



Rushmore est donc un grand film qui annonce déjà le génie de Wes Anderson et le soin minutieux qu’il apportera à sa réalisation. Malgré des décors loin d’être aussi somptueux que dans ses prochains films, Anderson use d’un talent fou pour créer une ambiance propre au chef-d’oeuvre critiqué ici. Il est d’autant plus plaisant de trouver si tôt les acteurs qui le suivront tout au long de sa filmographie, des acteurs sous-estimés et follement talentueux.

 

 

Bande-annonce

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