Sortie : film : 31 juillet 1968, édition : 28 juillet 2021
Durée : 1h55
Genre : Policier, Judiciaire, Epouvante-horreur, Thriller
De Kiyoshi Kurosawa
Avec Koji Yakusho, Masato Hagiwara, Tsuyoshi Ujiki, Anna Nakagawa, yoriko douguchi
Musique : Gary Ashiya

 

 

 

L’officier Takabe enquête sur une étrange série de meurtres qui ne comportent pas de meurtrier identifiable. A chaque fois, le tueur est retrouvé et est différent. Le seul point commun est une croix gravée dans le coup de chaque victime.

 

L’avis de Nicolas : 

 

Il est certain que Kiyoshi Kurosawa est un grand cinéaste japonais qui maîtrise avec grâce chaque genre qu’il aborde. Il a cette capacité qui consiste à créer de l’étrangeté dans le cadre. Sa mise en scène n’est pas construite autour de mouvements de caméras complexes mais plutôt d’un ensemble de plan fixe très élaborés qui suscitent l’effroi.

Il suffit de voir Kairo qui est l’exemple même de cette démarche. Ainsi, l’horreur dans ce film est créée à partir d’ombres qui surgissent d’un coin d’une pèce vide et plongée dans le noir. L’effroi n’est plus lié à une atmosphère fantastique (vent, portes qui claquent, maison étrange) mais plutôt au quotidien, à la ville.

 

 

 

C’est en effet un élément très représentatif de la j-horror, le courant moderne de l’horreur japonaise représenté entre autres par Takashi Shimizu ou encore Hideo Nakata.

Cure s’inscrit totalement dans cette démarche en prenant ses bases dans un type de thriller qui serait influencé par un film comme le Silence des Agneaux.

L’ambiance de Cure est très marquée par le style de Kurosawa qui s’oriente donc par un surgissement de l’horreur dans le quotidien. Il suffit de voir la première séquence de meurtre qui est totalement inattendue dans sa construction puisque l’on suit en premier lieu un homme qui se rend à un hôtel pour coucher avec une prostituée. C’est alors qu’il la tue avec un morceau de tuyau qu’il a arraché précédemment.

Kurosawa se permet de plus de créer une rupture de ton en incluant une musique plutôt joyeuse à l’ensemble. L’étrangeté qui se dégage de la séquence est marquée par une violence qui parasite le spectateur.

 

Kurosawa filme des apocalypses qui s’approchent petit à petit du quotidien. Kairo en est la parfaite illustration puisque le fantôme est traité comme un parasite qui détruit des vies et pousse à la solitude.

D’ailleurs, la solitude est également une thématique que l’on retrouve dans Cure avec le personnage de Takabe qui a une vie de couple assez difficile et va sembler très seul dans sa lutte contre le meurtrier. Ce dernier est également un être seul qui a une vie « éphémère » qui s’efface à chacun de ses agissements.

 

La violence et la solitude dominent chaque plan de Cure et lui apportent une ampleur qui sidère. Le dernier plan du film est d’ailleurs assez impressionnant car il s’agit de ce l’on pourrait nommer une « coupe parfaite ». Un mélange de frustration et de peur.

En conséquence, Cure devient un film ambitieux qui dépasse sa simple condition de film de genre. Il peut aussi s’agir d’un film de fantôme puisque plusieurs plans s’orientent dans cette position.

Par exemple, le premier plan où apparaît le tueur à l’écran l’introduit comme une figure abstraite qui envahit le monde dans lequel il apparaît. D’ailleurs, plusieurs fois le tueur est désigné comme un « démon ».

C’est pour cette raison que ce personnage est si impressionnant, il surgit de nulle part, est totalement imprévisible et possède une force quasi surnaturelle.

Cure ressort chez Carlotta dans une superbe version restaurée proposée en Blu-ray et Dvd simple le 28 juillet 2021. Il est accompagné du « jouet du démon », un exposé de Stéphane de Mesnildot, essayiste et spécialiste du cinéma japonais. Il y a également un entretien avec Kiyoshi Kurosawa.

Cure est donc un thriller qui parasite l’esprit du spectateur pour lui faire vivre le spectacle du mal à l’état pur. Car le mal surgit toujours des recoins les plus sombres de la normalité…

L’avis de Liam : 

Nombreux sont les thrillers à avoir joué de leur malaise ambiant pour instaurer une certaine atmosphère, avec l’espoir de marquer longuement leur public par cette instillement d’inconfort permanent. Si « Cure » rentre indéniablement dans cette catégorie, c’est avec un talent certain et une maitrise de la part de son metteur en scène qui parvient à nous enfermer dans un sentiment de cauchemar éveillé rendant sa découverte essentielle tout autant qu’elle n’est pas facile. Il suffit de voir le rythme arboré par le récit, sa manière de se jouer de l’écriture de son responsable tout en évitant le spectaculaire pour mieux frapper de manière sèche et brutale.

 

 

Un excellent exemple de cela se trouve dans l’usage de longs plans, suffoquant les spectateur en les obligeant à suivre au mieux certains instants, alors même qu’ils sont peu avenants. La sensation d’être prisonnier de certaines séquences est forte, surtout lors du choix de certains cadres. C’est ainsi que certains plans fixes captent une horreur diffusée dans un quotidien normé pour mieux brutaliser et impacter. Il suffit d’un simple champ contre champ pour appréhender une certaine sensation de perte avant de la relever sans tout à fait rassurer. En ce sens, Kiyoshi Kurosawa nous balade avec talent, et ce jusqu’à un dernier plan banal d’apparence mais aux promesses cauchemardesques à souhait par tout ce qu’il implique.

 

 

Concernant l’édition même, Carlotta met comme toujours les petits plats dans les grands techniquement. Il faut bien admettre que le blu ray reçu était d’un tel soin qu’il a grandement participé à la sensation particulière ressentie lors de la découverte du long-métrage.

 


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