Très attendu par la bobosphère, puis mis au pilori par les critiques presse (un peu) et spectateurs (beaucoup), j’avais hâte de voir ce film pour me faire ma propre opinion. Ayant beaucoup aimé, j’ai pris le temps de lire les différents avis négatifs et cela m’a donné envie de rédiger un article. Non pas pour convaincre les déçus, mais pour expliquer mon point de vue.

Quel est le propos du film ?

Si le titre, la bande-annonce et la promo mettent en avant le principe de miniaturisation des êtres humains afin de lutter contre la surpopulation, je pense que le propos du film est ailleurs. Il s’agit d’une réflexion sur le sens de la vie. Matt Damon et sa charmante épouse ne sont pas totalement heureux, il leur manque quelque chose, sûrement par manque d’argent, de temps, de poids de la routine. Sous couvert d’aider la planète, se faire réduire leur permettra de couler des jours heureux à Leisure Land, nom explicite. Beaucoup d’avis de spectateurs négatifs mettent en avant l’abandon progressif du Downsizing. Je le comprends mais je pense que c’est parce que le scénariste utilise la miniaturisation comme point de départ, et non comme sujet principal à cette œuvre.

Pourquoi tant de sous-sujets ?

On lit également que le film s’éparpille dans une multitude de sous-sujets, ce qui l’empêche de les développer véritablement. Pour moi, ce choix est cohérent avec le propos cité plus haut. La vie miniature apparait comme une solution miracle à tous les maux. Au final, Paul Safranek finit par être confronté au même problème central : comment donner du sens à son existence ? Tous les aspects développés (l’écologie, le problème des déchets, la société de consommation et l’appât du gain, les classes sociales, les migrants, etc) le sont faits de manière satirique, comme pour montrer que toutes ces grandes causes collectives sont vécues avec beaucoup d’hypocrisie par bon nombre de citoyens : leur choix de séjourner à Leisure Land est-il plus motivé par la planète, ou par leur plaisir personnel. Pas besoin donc de développer tous ces thèmes qui ne sont pas importants individuellement en tant que tel, mais qui le sont dans leur ensemble et dans leur opposition aux choix individuels.

Pourquoi l’arrivée de Ngoc Lan Tran est-elle cohérente ?

Beaucoup de spectateurs disent avoir totalement décroché avec l’arrivée de la Ngoc Lan Tran, virage où les Minimoys deviennent clairement plus secondaires. Pourquoi Paul est-il fasciné par cette réfugiée au caractère horripilant ? Parce que précisément, elle donne un sens à sa vie. Dans un premier temps, de par sa vocation professionnelle, oubliée au pays du plaisir. Il ressert enfin à quelque chose grâce à ses compétences au travail. Puis, petit à petit, lui qui a été abandonné lâchement par sa femme (alors que le couple semblait aimant), il s’éprend de la jolie vietnamienne, même si ce n’est peut-être pas totalement conscientisé tout de suite (à l’image de ses difficultés à répondre à la question sur le pourquoi on fait l’amour). C’est là que le film prend tout son sens selon moi. La vie de plaisirs ne le rend pas heureux, mais partager du temps avec une éclopé physique et de l’existence devient jouissif.

Pourquoi la fin est-elle dans la même lignée ?

Télérama n’a pas aimé que les écolos soient représentés comme une secte. C’est vrai qu’un film qui tourne ces savants en dérision et qui met en avant le travail pour redonner goût à la vie, ce n’est pas vraiment en adéquation avec la bien-pensance. La dernière demi-heure donne pour moi les réponses aux questions de Paul. Il est avec son voisin Dusan (Christoph Waltz, toujours aussi cabotin et talentueux), symbole de la personne qui profite de la vie, sans voir beaucoup plus loin et sans se soucier de la morale et de l’éthique. Notre héros se retrouve à nouveau face à un choix : vivre dans l’Arche de Noé, ou pas. Le Downsizing est loin, mais on reste dans la même logique. Au final, se faire miniaturiser n’a pas changé grande chose : il est toujours face au même problème : comment donner un sens à sa vie ? Sa décision finale donne une conclusion cohérente au film : il décide de mettre la priorité sur les humains, et non sur la planète. Il faut prendre soin des gens autour de nous, plutôt que de se perdre dans des causes bien trop grandes pour nous. Les dernières images du film restent dans la même cohérence. On peut même se dire que Paul s’est écarté de son métier d’ergothérapeute pour n’en garder que l’essentiel : aider les autres, médicalement ou autrement.

En conclusion, c’est vrai que le film est déroutant parce qu’il ne prend pas du tout la direction à laquelle on pouvait s’attendre. Le fait de privilégier les humains, au détriment de la planète peut surprendre et déranger. Downsizing est davantage une réflexion philosophique légère et non un film de science-fiction. Mais nous avons ici affaire à une œuvre originale et cohérente.


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Nicolas, 37 ans, du Nord de la France. Professeur des écoles. Je suis un cinéphile éclectique qui peut alterner entre blockbusters, films d’auteur, films français, américains, petits films étrangers, classiques du cinéma. J’aime quand les films ont de la matière : matière à discussion, à interprétation, à observation, à réflexion… Quelques films que j’adore pour cerner un peu mes goûts : Matrix, Mommy, Timbuktu, la Cité de la Peur, Mission Cléopâtre, Ennemy, Seven, Fight Club, Usual Suspect, Truman Show, Demain, Big fish, La Haine, La Vie est belle, Django, Rubber, Shutter Island...

1 COMMENTAIRE

  1. Bonsoir
    Ouf merci j’ai bloqué sur la fin et je crains un peu à avoir la trouvée par moi même.
    J’aime l’idée du choix planète /humain
    Je vais laisser ce qui me reste de neurones tranquilles.
    Bonnne soirée
    Gilles 65 ans

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