Tandis que l’on se plaint beaucoup de la production télévisuelle grand public française, il semble que les voisins d’Outre-Manche se sont spécialisés dans l’aspect qualitatif de leurs produits, bénéficiant également d’un fort culte. Ainsi, on a parlé récemment de « Sherlock », l’une des meilleures adaptations du héros d’Arthur Conan Doyle. On pourrait également aborder « Doctor Who », sans aucun doute l’une des meilleures séries de science-fiction jamais créée. Aujourd’hui, nous allons plutôt nous diriger vers les rivages de « Broadchurch » (qui partage d’ailleurs avec le show précédent un compagnon et désormais deux docteurs dans son casting).

La petite ville de Broadchurch est sous le choc en apprenant la mort d’un petit garçon retrouvé sur la plage. Deux policiers aux personnalités différentes vont alors enquêter sur ce décès qui va mettre sens dessus dessous tous les habitants.

L’avantage d’une série sur un film est de bénéficier d’une durée plus conséquente afin d’approfondir ses protagonistes. Cette déclaration peut sembler vaine par sa logique mais il ne faut pas oublier que c’est un point important qui explique le regain des productions télévisuelles en comparaison de ses homologues cinématographiques. Néanmoins, il faut savoir user de ce temps avec maîtrise et c’est ce que fait « Broadchurch ». Chaque personnage se voit ainsi conféré d’une personnalité propre, aidé par un casting dont les acteurs sont tous aussi bons les uns que les autres. Le point de vue multiple qui se fait permet une empathie totale pour chacun, tout en rendant la révélation finale de la première saison percutante (amenée d’ailleurs par une longue séquence). La psychologie de chacun est compréhensible, aussi bien dans les actes de bonté que de lâcheté. Le mot « humaniste » n’est pas galvaudé au vu des failles des personnages, que ce soit ces parents en deuil ou ces policiers qui ont du mal à avancer dans l’enquête.

L’ambivalence de nos héros permet d’ailleurs une division des points de vue intéressante. D’un côté, nous avons Alec Hardy, incarné par l’excellent David Tennant, qui est plus extérieur à l’affaire. C’est en effet un policier muté, venant tout juste de découvrir cette ville dans laquelle il pense pouvoir se reposer d’une affaire l’ayant détruit pyschologiquement (et qui sera plus amplement abordée dans la deuxième saison). De l’autre, Ellie Miller, jouée par Olivia Colman, est une femme de la région, connaissant personnellement les victimes et se sentant alors plus à l’intérieur même des événements car ils la touchent personnellement. Leur duo dispose d’une écriture aussi qualitative que pour les autres protagonistes, ainsi que d’une alchimie drôle mais surtout touchante.

Au vu de la résolution de la première saison, on aurait pu se dire que la série aurait pu se terminer là. Il s’avère pourtant qu’elle comptera deux autres saisons : une suivant le procès du meurtrier de Danny (que nous ne vous dévoilerons pas) et une autre concentrée sur une affaire de viol. Elles prolongeront toutes deux les questionnements des showrunners sur la faillite de l’être humain et de ses côtés les plus sombres, ainsi que la gestion d’un deuil des plus douloureux. La mise en scène s’avérera comme la série en elle-même : lyrique, poétique mais surtout humaine, au plus proche de ses personnages. Si les enquêtes passionnent et nous accrochent épisode par épisode avant de trouver à chaque fois une conclusion surprenante et logique à la fois, ce sont les êtres qui importent le plus.

De par l’humanité qu’elle dégage, « Broadchurch » peut être considérée comme l’une des meilleures séries que la télévision nous ait offerte. Forte et poignante, elle a la capacité de vous transpercer le cœur tout en vous ayant passionné par sa structure narrative et sa mise en scène délicate. Bref, c’est la preuve de la puissance que peuvent dégager les productions télévisuelles mais surtout que la réussite d’une œuvre passe par son aspect humain, aussi faillible et imparfait soit-il…


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