Année de sortie : 2004
Pays: Etats-Unis
Réalisateur : Alfonso Cuarón
Casting : Daniel Radcliffe, Emma Watson, Rupert Grint, Gary Oldman
Commençons par un fait : Alfonso Cuarón est un grand réalisateur ayant fourni avec « Les fils de l’homme » (l’exemple même d’œuvre parfaite dans tous ses aspects) et « Gravity » (superbe survival spatial considéré comme « simpliste » alors qu’il constitue aussi la sortie de dépression et donc le « retour sur Terre » d’une femme affectée par le deuil) deux films exceptionnels divertissants, matures et réfléchis de manière humaine, que ce soit sur un versant politique ou psychologique. Certains pourraient donc être étonnés de voir que le metteur en scène mexicain est derrière le troisième volet d’ « Harry Potter », ce qui serait mal juger une saga fantastique de bonne facture arrivant à retranscrire l’ambiance des livres de manière respectable dans des œuvres aux effets spéciaux encore crédibles et provoquant un attachement sincère. Et pourtant, ce film reste cohérent dans la filmographie de son réalisateur.
L’histoire suit donc Harry Potter qui va passer une année compliquée à Poudlard. En effet, Sirius Black, criminel dangereux, s’est échappé de la fameuse prison d’Azkaban afin de vraisemblablement tuer le fameux sorcier…
« Le prisonnier d’Azkaban » marque un certain tournant dans la saga Harry Potter en assumant une tonalité plus sombre que les deux volets précédents, tout en commençant par deux scènes proches de la farce enfantine (la « tante » et le bus). Ainsi, le film aborde la solitude d’Harry de par son passé et son destin, que ce soit par le récit ou la mise en scène (Daniel Radcliffe se retrouve souvent isolé ou séparé des autres personnages dans de nombreux plans). Néanmoins, le personnage trouve de nombreux échos dans ce film, notamment avec le personnage de Remus Lupin, qui a lui aussi un statut personnel à assumer, ou celui de Sirius Black, devant lui vivre avec de fausses accusations et des regrets mais aussi finalement une raison de joie en la personne d’Harry. Notre héros se voit donc comprendre qu’il doit vivre avec ce qui le constitue et apprend que, bien que ses amis soient là pour le réconforter en certains moments (comme Remus peut compter sur Sirius pour tenter d’arrêter ses pulsions), il doit faire face à certains seul (les Détraqueurs, symboles de désespoir et de chagrin, ne pouvant être repoussés que par un souvenir heureux) et prendre à bras cette situation (le plan final le montre ainsi s’envoler d’une foule, pouvant symboliser le soutien qu’il peut recevoir de ses proches).
Cuarón préfigure aussi à de nombreux instants certaines de ses scènes, que ce soit par des structures mécaniques d’horlogerie pour annoncer la péripétie temporelle finale, un oiseau en vol qui dévoile des lieux qui prendront de l’importance dans l’intrigue ou une répétition de certains plans (des passages à travers des vitres annonçant la scène de cours contre l’Épouvantard s’ouvrant et se refermant par un passage de miroir, annonçant elle-même Harry devant faire face à ses peurs, ou encore les nombreux plans sur le Saule Cogneur). Il insère également dans ce film ses idées de mise en scène avec une caméra souvent en mouvement, une utilisation du cut justifiée (notamment lors de la scène avec la « tante » où son utilisation répétée souligne le « chaos » de la situation) ainsi qu’une attente dans son arrivée privilégiant donc des séquences à la durée plus longue, ainsi que quelques plans séquences discrets (notamment un central où Harry discute avec le père de Ron qui l’isole encore de ses amis tout en mettant Sirius Black aux alentours de la conversation), une caméra qui se voit « salie » pour plonger le spectateur dans le récit (comme dans « Les fils de l’homme » notamment).
Avec ce « Prisonnier d’Azkaban », Alfonso Cuarón prouve une fois de plus son talent et marque un tournant dans une saga grand public de qualité en offrant un très bon divertissement à la mise en scène superbe. D’un autre côté, on parle de Cuarón…