Réalisateur : Raúl Arévalo
Acteurs : Ruth Diaz , Antonio de la Torre, Luis Callejo, Raúl Jiménez, Manolo Solo
Genre : Thriller
Nationalité : Espagnol
Date de sortie : 26 avril 2017
Âge : Interdit aux moins de 12 ans
Durée : 1h32mn
Note 4/5
Un homme attend huit ans pour se venger d’un crime que tout le monde a oublié.
L’acteur espagnol Raúl Arévalo (déjà vu dans La isla minima, Les amants passagers ou encore Même la pluie) a mis huit longues années pour monter ce projet que beaucoup de producteurs cherchaient à édulcorer afin de le rendre plus grand public et donc moins risqué sur le plan commercial. Toutefois, Arévalo n’a rien cédé et, avec la même patience que le personnage principal de son film, il a fini par avoir gain de cause.
Cette obstination a été récompensée par 4 Goya (équivalent de nos César) dont celui de meilleur film espagnol de l’année. C’est donc auréolé de ce titre glorieux que son premier long-métrage en tant que réalisateur arrive sur nos écrans, fort d’une bande-annonce efficace, suscitant la curiosité.
Cela commence d’ailleurs fort avec un formidable plan-séquence où le spectateur se retrouve témoin d’un braquage qui tourne mal, planqué à l’arrière de la voiture qui fait le guet. La course-poursuite qui s’ensuit est d’une efficacité toute américaine au point que l’on se croirait dans le cinéma immersif d’Alfonso Cuaron. Malheureusement, cette audace formelle disparaît assez vite et Arévalo déploie ensuite une mise en scène rigoureuse, mais au classicisme assumé.
Pendant une vingtaine de minutes, le cinéaste se plaît à brouiller les pistes en déployant une structure narrative éclatée qui préserve le mystère entourant ce personnage mutique et glacial incarné par Antonio de la Torre. Peu à peu, l’atmosphère se fait plus lourde et le noir dessein de cet homme nous semble de plus en plus clair. Incarnant une figure vengeresse qui ne vit plus que dans un seul but – assouvir sa soif de justice personnelle – Antonio de la Torre se révèle parfait tant il pourrait incarner Monsieur tout-le-monde.
Au bout d’une heure plutôt lente, mais toujours sur le fil du rasoir, l’explosion de violence n’en est que plus frappante, aussi soudaine et douloureuse que dans un film de Scorsese. Dès lors, le métrage prend une allure implacable, faisant de cette figure héroïque un vengeur aussi froid qu’inquiétant.
On n’est jamais très loin du western, notamment lors des scènes finales qui se déroulent en plein soleil, au milieu de paysages désertiques. Le cadre, plutôt original pour un film noir, vient renforcer la référence du cinéaste envers tout un pan de cinéma américain radical des années 70. Sa réalisation sèche et directe fait ainsi beaucoup penser à celle de Don Siegel, et aussi, par extension, de Clint Eastwood.
Toutefois, malgré cette indéniable efficacité, on est en droit de regretter l’absence de sous-texte ou de contextualisation qui auraient donné à l’ensemble une certaine plus-value artistique. Le scénario, faussement alambiqué, peut ainsi se résumer à une simple histoire de vengeance comme on en voit des milliers dans le cinéma de genre policier depuis des décennies.
A force de vouloir dépouiller le film de tout artifice et de tout arrière-plan sociologique, le cinéaste livre donc un polar noir d’une portée immédiate, mais limitée par son absence de point de vue sur la question évoquée en filigrane, à savoir peut-on se faire justice soi-même.
Bande annonce