À l’occasion de leur sortie en coffret collector limité Blu-Ray/DVD chez Carlotta, revenons sur deux films de Lino Brocka : « Manille » et « Insiang ».
« Manille » suit Julio, un pêcheur parti depuis sept mois dans la capitale philippine pour retrouver sa fiancée. « Insiang » porte le nom de son héroïne, une jeune femme vivant avec sa mère dont le nouvel amant, un petit caïd, va essayer de la séduire…
La première chose que l’on constate en regardant ces deux films est le milieu représenté. En effet, Manille se voit montrée comme une ville pauvre, où les habitants subsistent plus qu’ils ne vivent et où la pauvreté peut mener à tout. Ses personnages tentent de se sortir de ce milieu social précaire, en vain. Ils doivent se débattre avec une violence et une indigence qui fait perdre toute valeur à l’être humain. C’est donc, par un premier aspect, un combat social que vont devoir faire Julio et Insiang pour s’en sortir, alors même qu’ils ne cherchent pas nécessairement à se battre mais juste à survivre.
Ensuite, c’est à une tournure politique que l’on peut assimiler ces films. En effet, le quotidien représenté est, pour le spectateur, effarant au vu de la situation des personnages. Lino Brocka tend donc aux autorités de l’époque un miroir des travers auxquels leur politique a contribué. Sans réelle esbrouffe technique, le réalisateur cherche surtout à plonger le spectateur dans cette ville où l’on délaisse les habitants et laisse ceux-ci tomber dans une déchéance morale des plus crues, dans une forme de réalisme brut indécent et révoltant auquel il est difficile de rester insensible.
Les Blu-Ray contiennent les deux films, « Manille » restauré en 2K et « Insiang » en 4K. La qualité d’image est donc présente, tout comme pour l’aspect sonore, respectant l’aspect réaliste de sa prise de son afin de mieux nous mettre en condition dans la société représentée. Les deux disques contiennent de nombreux bonus (dont une introduction à « Manille » par Martin Scorsese) tout comme le troisième disque, DVD cette fois-ci, reprenant le documentaire « Retour à Manille : le cinéma philippin ». En cinquante-sept minutes, Hubert Niogret revient sur un cinéma actuellement mis de côté dans nos contrées face aux « concurrents » sud-coréens, indonésiens et japonais, mais au passé important sur la scène asiatique, notamment pour l’engagement politique dépeint dans certaines œuvres.
C’est donc un beau coffret que nous offre Carlotta avec ces films et c’est une excellente occasion pour chacun de découvrir le cinéma philippin avec deux œuvres sociales fortes et engagées.