Cast member Malou Khebizi poses during a photocall for the film "Diamant Brut" (Wild Diamond) in competition at the 77th Cannes Film Festival in Cannes, France, May 16, 2024. REUTERS/Clodagh Kilcoyne

Être influenceuse, c’est influer sur la vie des gens, être un modèle.
On a besoin de modèles, de pairs, de pères et de repères pour bien grandir.
Des héros, des héroïnes.

Diamant brut, c’est le portrait d’une héroïne, ou d’une anti-héroïne ?
Une ode aux modèles en forme de poupées Barbie russes.
La petite sœur qui prend sa grande sœur pour modèle, futur Little Miss Sunshine ?
Liane qui prend sa mère pour anti-modèle : non, tout mais pas ça, surtout ne pas devenir comme elle.
La conseillère de la mission locale qui essaie de lui montrer une voie-modèle.
Ses copines, à la fois ses semblables, jusqu’à un certain point. Car elle, elle veut plus. Elle veut étendre son monde jusqu’à Miami.

WELCOME TO MIAMI

Mais surtout, elle veut être aimée.
Être aimée plus.
Sûrement parce qu’en vrai, elle a été aimée moins ?

C’est quoi être aimée ?
Comme dit la directrice de casting (une « déesse » nous dit le film), tout le monde va t’adorer, adorer tes vidéos, ta personnalité.
Être aimée, c’est multiplier les followers.
Être vue, encore plus vue, encore plus de vues.
Être likée, encore plus de likes.
Être aimée plus, c’est être aimée par plus de gens.
Plus on parle de moi mieux c’est.
Être reconnue dans la rue.
Être aimée plus, c’est gagner de la maille.

ETRE AIMEE, C’EST CE QU’IL Y A DE PLUS BEAU

Être aimée, c’est pas forcément rencontrer cet ancien complice de foyer.
Qui pourtant semble l’aimer de la façon la plus simple et parfois maladroite.
Ce garçon qui lui a pour modèle son frère qui taffe dur pour faire tourner son circuit de karting.
Autre modèle, autres mœurs. Ne pas se faire entretenir, ne pas dépendre d’un mec, peut-être parce que son père à elle est tout sauf fiable.

Alors, pour être aimée, la fille qui rêve d’être top model se modèle.
Modelage pour être à la mode.
Faux ongles, faux cils, fausses mèches, faux seins, faux tatouage, bientôt fausses fesses.
C’est un vrai job, un travail de sculpture du fake sur sa propre personne.
Exigeant. Prenant.

Tout ça, ça va lui permettre de réaliser son rêve : faire de la télé¬-réalité.
Comme elle dit, « pour que tout le monde la voit telle qu’elle est vraiment ».
Elle accumule les faux pour être vraiment elle.
Réalité. Télé-réalité.

LA REALITE DANS LA TELE

Bergson parlait de moi individuel et de moi social. Mais pas Liane.
La réalité s’inverse.
Sois icône et tais-toi.
Tais-toi, mais ne sois pas toi.

On suit le parcours de cette anti-héroïne.
Elle est prête à tout pour gravir l’ascenseur social et briser le plafond de verre.
Est-ce que l’on vit ce parcours comme une ascension ?
Comme un parcours initiatique de quelqu’un qui part de rien, qui franchit des steps pour arriver au sommet ?
Des steps ? Quels steps ?
En vrai, ne vit-on pas le parcours d’une nana plutôt (très) paumée qui semble tourner en rond dans son marasme encrassé ?

LA RAISON A SES RAISONS QUE LA MORALE IGNORE

La fin semble apporter une réponse. Peut-être surprenante.
Elle a bien raison Liane, depuis le début.
Tout son travail sera récompensé.
Elle deviendra le modèle de millions de followers, de téléspectateurs, de petites filles.
D’une génération ?
Et cette petite histoire en générera plein d’autres.
Plein plein d’autres.
A la force du fake, elle deviendra une modèle au top.


Article précédentJuré N°2, un verdict de Clint Eastwood
Article suivantEn décembre sur Netflix
Marcel Duchamp
Marcel Duchamp, du Nord de la France. Slameur et cinéphile éclectique qui peut alterner entre blockbusters, films d’auteur, films français, américains, petits films étrangers, classiques du cinéma. J’aime quand les films ont de la matière : matière à discussion, à interprétation, à observation, à réflexion… Quelques films que j’adore pour cerner un peu mes goûts : Matrix, Mommy, Timbuktu, la Cité de la Peur, Mission Cléopâtre, Enemy, Seven, Fight Club, Usual Suspect, Truman Show, Demain, Big fish, La Haine, La Vie est belle, Django, Rubber, Shutter Island...

Laisser un commentaire