Date de sortie : 29 août 2003 (Japon), 1er décembre 2003 (États-Unis), 18 mars 2004 (Europe)
Développeur : Brownie Brown
Concepteur : Koichi Ishii
Genre : Action-RPG
Nationalité : Japon
Compositeur : Kenji Ito
Console : Game Boy Advance
Après quatre jeux très réussis malgré une qualité globale descendante, Squaresoft (entre temps devenu Square-Enix) penche sur un nouveau titre intitulé Shinyaku Seiken Densetsu, qui a la particularité d’être un remake de l’épisode fondateur, sorti en 1991. Intitulé Sword of Mana en Occident, il cherche à prendre son indépendance sur Final Fantasy et il subit de profonds changements au point d’effacer tout élément de ce dernier (exit le Chocobo et la transformation en Mog) et arbore la direction artistique propre à la saga. Les musiques remixées se reconnaissent immédiatement et restent de grande qualité malgré la faiblesse du processeur sonore de la Game Boy Advance. Certains noms sont même modernisés : c’est notamment le cas de Roi Noir, qui devient ici le Chevalier Noir, avec une identité fort intéressante cachée derrière son masque.
Le système de jeu met de côté ce qui faisait le charme de Mystic Quest et reprend les armes classiques de la série (avec cependant la présence de la faucille, du fléau et de la chaîne, l’épée étant réservée au héros et le bâton à l’héroïne), qu’on trouve souvent en battant de nouveaux monstres dans une pièce. On retrouve également les huit esprits magiques, avec chacun une compétence de soutien une offensive. S’il est possible d’augmenter leur niveau proportionnellement à leur utilisation, elles restent grandement sous-exploitées car elles servent surtout à détruire des sceaux pour avancer. Le joueur les obtient généralement après avoir battu un boss, et ce tout au long du jeu (Ombre se trouve par exemple peu avant les derniers donjons). Si l’on peut toujours donner plusieurs coups à la suite sans la moindre jauge ATB, frapper un ennemi augmente une jauge permettant d’utiliser une attaque spéciale. Sword of Mana intègre même de petits éléments de plates-formes, octroyant la possibilité de sauter et de se baisser : sympathique, mais plutôt gadget. Très simple d’accès, le jeu se veut bien trop facile lorsque l’on prend le temps d’affronter chaque ennemi sur notre route. Si certains combats de boss sont assez intenses, d’autres peuvent être pénibles étant donné la difficulté d’accès aux points sensibles, et un certain nombre se terminent très rapidement si le joueur utilise une arme puissante.
Le level design évolue dans le sens de la saga avec des donjons plus agréables et moins labyrinthiques. Les villes sont agrandies et obtiennent plus de caractère. La map ressemble néanmoins davantage à une accumulation de zones : on perd ainsi le sentiment de liberté très agréable de Mystic Quest mais on retrouve quelque peu le charme de Secret of Mana avec un thème principal mythique et des panneaux indiquant les différents lieux de l’aventure. Certains donjons deviennent des lieux plus emblématiques : l’antre du vampire s’appelle désormais le Manoir Vinquette et le comte Lee a sa place dans le scénario comme meilleur ami de Granz, le chevalier Gemme qui a vaincu Vandole par le passé. On retrouve également le vendeur itinérant Niccolo, ainsi que P’tit Cactus de Legend of Mana avec une serre que l’on peut ériger afin de forger son équipement et avoir un résumé des événements sous forme de journal. En mélangeant deux graines, on récolte des fruits et des légumes auprès de l’arbre Trent, indispensables pour améliorer les armes en plus de matériaux trouvés ailleurs. Si ce système ne fonctionne pas trop mal, il reste assez brouillon et peu intuitif étant donné la recrudescence d’objets que l’on ramasse sans arrêt dans des coffres ou lootés par les ennemis.
Les statues de Trials of Mana sont également de la partie pour les sauvegardes, les dorées rechargeant également les points de vie et de magie. Chaque level-up permet de choisir les statistiques à privilégier entre différents types d’évolution symbolisés par les fonctions de guerrier, de moine, de magicien, de sage et de voleur. Il n’est possible de revenir en arrière que très tard dans le jeu, à partir du moment où les voyages canons sont opérationnels. Cela ne représente cependant que peu d’intérêt car les quêtes secondaires proposées sont très monotones, souvent résumées à aller chercher des objets ou distribuer des pubs. Sword of Mana se trouve donc un peu trop linéaire, là où Mystic Quest permettait de revenir n’importe où avec le Chocobo pour trouver des zones cachées sur la map.
Le scénario est largement enrichi de nombreux dialogues, d’un background bien plus approfondi pour les personnages et du choix entre le héros et l’héroïne pour parcourir le jeu, modifiant certains passages dans l’avancée (notamment celui de l’aéronef, où un long dialogue s’installe entre l’héroïne et le Chevalier Noir). Il y a par exemple une assez longue introduction avant le combat contre le premier boss, où les conditions de vie sont discutées entre le héros, Willy et Amanda ; encore avant, un cauchemar montrant le passé où l’on voit le héros tenter de fuir avec l’héroïne, et ses parents se faire tuer par le Chevalier Noir, dont il veut alors se venger. La dualité entre les deux personnages est bien mieux mise en avant grâce à des dialogues assez forts à chacune de leur rencontre. Le Chevalier Noir s’avère n’être qu’un masque derrière lequel se cache le prince Strall, fils de Granz et de Médusa (qui n’était qu’un simple boss dans Mystic Quest), une Mavole tourmentée par son union interdite avec un humain. Sans le savoir, le héros tue alors la mère de Strall en la combattant, répétant ainsi ce que lui avait fait ce dernier. Si sa mort est encore plus épique sur le toit du château au milieu du jeu, le combat reste ridiculement facile.
Julius a quant à lui un physique moins inspiré (on dirait le héros en mode obscur) mais reste assez subtil pour son apparition plus tardive (dans la salle des cercueils du Manoir Vinquette, sans savoir à qui on a à faire), le miroir qui dévoile en lui la réincarnation de Vandole quand il se brise, les apparitions de son ombre et sa tentative de soumettre le héros au pouvoir des ténèbres. Son combat de fin est plus intéressant car sa dernière forme ne peut pas être frappée tout le temps. Deathjester effectue lui aussi son retour sous les traits d’Avale-Mort, un personnage proche de La Mort de Castlevania qui ne prend pas parti dans le conflit, étant simplement là pour récolter des âmes. Les anciens chevaliers Gemme Bogard et Cibba sont aussi bien plus présents, et Watts devient carrément notre forgeron dans la serre. Un autre élément de scénario intéressant concerne l’épée Mana, qui s’avère ici être une simple épée rouillée sans qu’aucun pouvoir ne la réveille, la bravoure venant des épreuves relevées par le héros pour aller la trouver.
Assez ambitieux, bancal sur quelques points mais très réussi dans son ensemble, Sword of Mana est un remake assumé qui transforme considérablement son modèle tout en le repensant et en enrichissant son univers pour mériter sa place parmi les meilleurs jeux de la Game Boy Advance, aux côtés de The Legend of Zelda the Minish Cap et de Castlevania Aria of Sorrow. Il signe également la fin de la qualité de cette saga mythique pour de nombreuses années, les épisodes suivants s’avérant de plus en plus médiocres sur DS et PS2.