A l’intérieur de Julien Maury et Alexandre Bustillo.
Il fut un temps où la France avait une réputation de films d’horreur extrême. Une nouvelle vague de réalisateurs n’hésitant pas à aller dans la violence extrême était en train de naître avec notamment Alexandre Aja (« Haute Tension »), Pascal Laugier (« Martyrs ») et Xavier Gens (« Frontières »). Parmi eux, il y a le tandem Maury et Bustillo, deux passionnés de film d’horreur (l’un travaille d’ailleurs pour le magazine « Mad Movies ») qui vont provoquer à leur tour un électro choc en 2007 avec leur film « A l’intérieur ».
Sarah, une jeune femme enceinte, voit sa vie basculer lorsqu’elle perd son compagnon dans un accident de voiture. Alors qu’elle va passer son réveillon de Noël seule, elle voit une femme faire irruption dans sa demeure avec un unique but : arracher du ventre de Sarah l’enfant qu’elle porte…
Huit clos brutal et violent, « A l’intérieur » est une lutte acharnée entre deux femmes, deux visages différents sur la maternité qui s’opposent. Car tout le sujet de ce film est cet amour maternel qui conduira nos deux protagonistes à s’affronter et servira surtout à humaniser un personnage proche au départ d’un boogeyman, d’une silhouette sans plus d’épaisseur (elle n’a même pas de prénom) avant de finir en personnage tragique. ATTENTION SPOILER ! Nous nous retrouvons donc dans un duel entre une jeune femme qui ne veut plus du bébé qu’elle porte car il lui rappelle la perte de l’homme qu’elle aime et tuant accidentellement (et symboliquement ?) sa mère et une femme plus âgée qui tient absolument à récupérer l’enfant de Sarah, tel un dû de l’être qu’elle a perdu lors de l’accident de voiture. FIN DU SPOILER !
Ici, ce sont les femmes qui sont mises en avant. Les hommes deviennent eux des futures victimes prêtes à connaître un sort peu favorable malgré leur tentative de mise en avant (le policier), au point que l’un des personnages masculins se fera poignardé dans les parties génitales. Emasculation symbolique de la part de deux réalisateurs qui, bien que de sexe masculin, aiment à mettre en avant de bons personnages féminins (voir « Livide », « Aux yeux des vivants » et peut-être « Leatherface », préquelle de « Massacre à la tronçonneuse». Moins que le contexte politique des banlieues (comme « Frontières » a essayé de faire), c’est le contexte humain qui est mis en avant et en cela, la violence, qui aurait pu virer dans le grand guignol à la Saw, reste profondément organique (tel « Martyrs » de Pascal Laugier, lui aussi auteur d’un grand film sur la maternité avec « The secret ») tout en étant d’une crudité effarante.
D’une beauté (cette scène de cigarette où la violence du film infecte l’image) et d’une efficacité rare (avis aux amateurs de gore en quête de sensations fortes), « A l’intérieur » est l’une des preuves que le cinéma de genre français peut être supérieur à beaucoup de sorties américaines finissant dans nos salles obscures et que si l’on laisse assez d’argent à des personnes passionnées derrière la caméra, le cinéma français pourra arrêter d’être jugé pour ses (trop) nombreuses comédies faisandées et gagner un peu plus en cœur.
Liam Debruel