Date de sortie : 12 février 2020 (1h 33min)
Réalisateur : Stéphane Demoustier
Acteurs principaux : Melissa Guers, Roschdy Zem, Chiara Mastroianni, Anne Mercier, Anaïs Demoustier
Genre : Drame judiciaire
Nationalité : Français
Compositrice : Carla Pallone
Drame judiciaire réalisé par Stéphane Demoustier (Terre Battue, Allons Enfants), La Fille au Bracelet se concentre sur le procès d’une adolescente de dix-huit ans, accusée d’avoir tué sa meilleure amie lors d’une fête donnée chez cette dernière deux ans plus tôt. Dans la même veine que le film argentin Acusada ou encore qu’Apparence Trompeuse revenant sur l’affaire Amanda Knox, le scénario a pour personnage principal Lise Bataille, brillamment interprétée par Melissa Guers, dont c’est le premier rôle au cinéma. Après quelques semaines en détention durant son instruction, Lise est soumise à la liberté surveillée, un bracelet électronique attaché à ses chevilles. Débutant sur une heureuse scène de vacances en famille, La Fille au Bracelet lance annonce d’emblée la couleur tandis que deux policiers viennent chercher la jeune fille de seize ans pour l’interroger.
Le parti pris du film est de faire vivre le procès au spectateur comme s’il était lui-même juré, ignorant si l’accusée est coupable ou innocente, son opinion étant remise en cause durant l’évolution des débats. Joué par Roschdy Zem (Les Hommes du Feu, Le Jeu, Roubaix une Lumière), le père de Lise est très présent et déterminant dans l’autorité bienveillante proche de la jeune fille. Plus discrète et intervenant plus tard sous les traits de Chiara Mastroianni (Non ma Fille tu n’iras pas Danser, Les Bien-Aimés, Chambre 212), Céline Bataille apporte une once d’humanité touchante dans la défense de sa fille. Tourné au palais de justice de Nantes, le film se concentre essentiellement sur le procès, le spectateur ne quittant la salle d’audience que pour quelques séquences à l’extérieur faisant avancer l’intrigue à leur façon. Le juge y est incarné par Pascal-Pierre Garbarini, avocat à Paris.
Captivant grâce à une réalisation impeccable magnifiée par la tension provoquée par les violons de Carla Pallone, La Fille au Bracelet s’étend moins sur le meurtre que sur le mutisme de cette adolescente que personne ne semble cerner. Inconséquente, d’apparence presque innocente, son visage impassible et la fragilité enfouie derrière son masque d’indifférence provoquent toujours plus de doute, d’autant que les pièces à conviction ne tendent que vers elle. Refusant d’entrer dans le rôle qu’on attend d’une accusée, Lise assiste à son procès dans une indifférence très marquée. Elle se contente de répondre à des questions simples et ne se défend brièvement que lorsqu’elle se sent injustement attaquée. Interprétée par Anaïs Demoustier (Hellphone, Quai d’Orsay, Les Malheurs de Sophie), l’avocate générale tente en effet de la déboussoler par des questions incisives cherchant à faire éclater la vérité qu’elle imagine.
À travers une histoire de vidéo dévoilant une pratique sexuelle postée sur Internet sans l’accord de l’intéressée, l’accusatrice s’accorde la liberté d’une leçon de morale visant à pointer du doigt des pratiques qui ne sont pourtant pas pénalement répréhensibles. Contestés par l’avocate de Lise, ces propos montrent qu’au-delà d’un simple procès pour meurtre, le film interroge surtout le fossé des générations en mettant en scène des adultes qui jugent des adolescents. À la suite des interventions percutantes des avocats et aux regrets exprimés par Lise, la dernière séquence montrant qu’elle s’attache son collier là où se trouvait le bracelet s’avère lourd de sens quant aux deux interprétations possibles que l’on peut en faire. Et c’est bien là toute la force du long métrage, car si l’acquittement prouve une chose, c’est bien qu’aucune preuve tangible n’a permis de faire condamner l’accusée. Mais s’il paraît plus que clair qu’elle se sent coupable, rien n’est pourtant moins sûr.