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Titre du film : Sugar Man
Titre original : Searching for Sugar Man
Réalisation, scénario et montage : Malik Bendjelloul
Photographie : Camilla Skagerstöm
Musique : Sixto Díaz Rodríguez
Genre : documentaire
Durée : 86 minutes
Production : Simon Chinn, M. Bendjelloul
Distribution : ARP Sélection
Pays d’origine :  Suède,  Royaume-Uni
Sortie : 24 août 2012 en Suède ; 26 décembre 2012 en France
Genre : documentaire à caractère biographique et musical

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Quand la réalité dépasse la fiction, cela donne Sugar man : un documentaire aussi étonnant que passionnant, à voir absolument.

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En 1969 et en 1972, Sixto Rodriguez enregistre deux albums qui passent totalement inaperçus, renvoyant le sixième enfant d’une famille ouvrière de Detroit à l’anonymat. C’est un échec, à tel point qu’on raconte qu’il se serait suicidé sur scène. Plus personne n’entendit parler de Rodriguez. Sauf en Afrique du Sud où, sans qu’il le sache, son disque devint un symbole de la lutte contre l’Apartheid. Mais en Australie et en Nouvelle-Zélande, certaines des chansons de Rodriguez font leur chemin. Nulle part elles ne vont aussi loin qu’en Afrique du Sud, où l’une d’entre elles devient même un hymne de combat contre l’Apartheid. Pendant ce temps, Rodriguez passe une licence de philosophie aux Etats-Unis et travaille sur des chantiers sans savoir qu’il est devenu une véritable légende en Afrique du Sud. Deux fans du Cap décident de partir à la recherche de «Sugar Man»…

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C’est une très étonnante histoire qui s’offre au spectateur avec ce documentaire prouvant une fois de plus que la réalité dépasse souvent de loin la fiction. Après avoir enregistré deux albums dans la mouvance de Bob Dylan ou encore de Simon and Garfunkel, Sixto Rodriguez est demeuré un parfait inconnu aux Etats-Unis, son pays natal, au point qu’il décide d’abandonner la carrière musicale et de disparaître complètement de la vie publique. Certaines rumeurs parlent même d’un suicide sur scène, ce qui s’accorderait plutôt bien avec l’aspect désespéré de sa musique. Pourtant, au cœur des années 70, son premier disque est parvenu jusqu’en Afrique du Sud où il rencontre un succès phénoménal et devient même l’hymne de la lutte contre l’Apartheid. Véritable icône nationale, le chanteur devient culte sans qu’il n’en sache jamais rien. Effectivement, la question des droits d’auteur semble nébuleuse et le chanteur n’a, semble-t-il, jamais touché un centime des faramineuses ventes de son disque en Afrique du Sud. Dans les années 90, des fans afrikaners décident d’entamer des recherches afin de savoir si Rodriguez est toujours vivant. C’est cette incroyable quête que raconte Sugar man par le menu.

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Quand le documentariste suédois s’intéressa au cas, ce nom ne circulait que parmi les amateurs du rock des années 1970. La réédition de ses deux (excellents) albums, Cold Fact et Coming from reality, en 2008, n’avait pas fait grand bruit, non plus que la résurrection sur scène du grand oublié, absent pendant deux décennies. Ce film change tout. Il y a d’abord l’histoire qu’il raconte, vue d’Afrique du Sud, où Rodriguez, ignoré aux Etats-Unis, rencontre à son insu un étonnant succès.
Le récit de l’enquête devient alors passionnant et ne lésine pas sur les effets de suspense. Mais l’émotion culmine avec l’apparition du chanteur lui-même, humble et charismatique, retrouvé dans une bicoque de la banlieue de Detroit, ville qu’il n’a jamais quittée : après le flop de sa première carrière, très brève, il s’était remis à travailler sur des chantiers, tout en s’essayant à la politique… Le triomphe progressif du film, devenu phénomène, a depuis drainé partout dans le monde des foules autour des concerts de Sixto Rodriguez. Ou comment un documentaire a priori confidentiel illustre aujourd’hui, en plus de la réparation d’une injustice, la puissance de la narration et celle du cinéma.

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Ayant toujours à cœur de réaliser un bel objet cinématographique, Malik Bendjelloul soigne sa mise en scène, se sert de l’animation pour évoquer certains épisodes de son histoire et filme la ville de Detroit comme un peintre – on pense parfois aux toiles de Hopper. Mais le plus incroyable vient des multiples révélations qui viennent ponctuer à intervalles réguliers ce film-enquête passionnant. Non seulement on découvre ici de nombreuses chansons de l’artiste, pour la plupart diffusées en intégralité, nous permettant de mieux saisir l’univers mélancolique d’un homme engagé, mais nous pouvons aussi saisir l’état d’esprit frondeur d’une époque de lutte (les années 70). Porté par une musique simple (guitare sèche, quelques arrangements de cordes et une belle voix), mais réellement émouvante, Sugar man est aussi le portrait touchant d’un homme resté fidèle à ses idéaux.

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Comment un inconnu dans son propre pays devient plus célèbre que les Rolling Stones dans un autre (sans le savoir) : ce n’est là que le premier d’une longue série de phénomènes étonnants dévoilés au cours de ce Sugar Man. Si Rodriguez sera inconnu à la majorité des spectateurs du film, Malik Bendjelloul nous accroche à son récit en posant d’emblée l’issue tragique que la rumeur lui prête : le musicien se serait immolé sur scène suite à un concert raté, goutte faisant déborder un vase rempli d’échecs. La méthode n’est pas des plus subtiles mais il faut reconnaître qu’elle instille une nimbe de mystère autour du personnage.

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Les récits de la rencontre de Rodriguez par ses futurs producteurs en deviennent immédiatement intrigants, d’autant plus que le réalisateur retarde au maximum l’apparition de l’image du chanteur à l’époque des faits, préférant proposer en contrepoint à ces témoignages des paysages dessinés à la craie ou des animations numériques. Palliant intelligemment l’absence d’archives filmiques de cette époque, Malik Bendjelloul reconstitue le tripot enfumé où Rodriguez joue de dos, imagine une silhouette se déplaçant seule dans les rues de Detroit et nous les fait parcourir, ces paysages qui ont enfanté les textes de l’auteur-compositeur alors que l’on en découvre la musique.

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Après un passage par Palm Springs, direction Le Cap. L’imagination des fans Afrikaner prend le relai : dépourvus de toute information concernant leur idole, hormis les quelques indices trouvés sur les pochettes de ses disques, les plus fervents d’entre eux finirent par ne plus se contenter des légendes urbaines. Leur enquête pour en savoir plus sur Rodriguez et sur les conditions de sa mort est détaillée pas à pas par Malik Bendjelloul et alimente le mystère plutôt que de le dissiper.

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À mesure que le film progresse, il devient clair que le réalisateur tenait là un sujet en or tant l’histoire de Rodriguez renferme une infinité de ramifications toutes plus frappantes les unes que les autres. Le regard sensible du cinéaste, plutôt que de s’égarer dans ces pistes multiples, les utilise pour nourrir le portrait d’une figure difficile à aborder de front. L’énigme que constitue Rodriguez perdurera en effet une fois tout les faits établis, de par sa nature même, totalement hors normes. Si la mise en scène de soi est souvent la clé du succès, ici, un individu extraordinaire semble tout faire pour éviter de se révéler comme tel.

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À sentir l’impact de sa vie sur celles des autres, à entendre leurs récits, se dessine pourtant un personnage profondément original, à la fois sans compromis envers son art et prêt à mettre son énergie aux profits d’autres causes, à renoncer à la reconnaissance ou à l’accepter indifféremment, sans la moindre trace de vanité. La tournure cendrillonesque que prend l’aventure de Rodriguez lorsque ses filles la décrivent tranche avec celle que lui semble avoir vécue : un fait agréable, mais qui ne change rien, comme si toutes ces histoires n’avaient au fond pas beaucoup d’importance. Ironique conclusion pour un film qui fait partager l’émotion musicale et en expose la puissance.

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Le cinéaste parvient à toucher la corde sensible du spectateur lors du concert en Afrique du Sud datant de 1998. Ce pur moment de communion entre un artiste et son public est le point d’orgue d’un documentaire absolument remarquable. On peut seulement regretter que le cinéaste n’insiste pas davantage sur les problèmes de droit d’auteur. Si le spectateur entrevoit une éventuelle escroquerie, rien n’est vraiment fait pour nous éclairer sur ce sujet pourtant fondamental. De nombreuses zones d’ombre demeurent une fois la lumière allumée dans la salle, mais une évidence s’impose de manière certaine : les amateurs de musique folk engagée sont certainement passés à côté d’un artiste majeur de son temps. Et c’est peut-être le plus triste dans cette aventure terriblement humaine.


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Cinéphile depuis mon plus jeune âge, c'est à 8 ans que je suis allé voir mon 1er film en salle : Titanic de James Cameron. Pas étonnant que je sois fan de Léo et Kate Winslet... Je concède ne pas avoir le temps de regarder les séries TV bonne jouer aux jeux vidéos ... Je vois en moyenne 3 films/jour et je dois avouer un penchant pour le cinéma d'auteur et celui que l'on nomme "d'art et essai"... Le Festival de Cannes est mon oxygène. Il m'alimente, me cultive, me passionne, m'émerveille, me fait voyager, pleurer, rire, sourire, frissonner, aimer, détester, adorer, me passionner pour la vie, les gens et les cultures qui y sont représentées que ce soit par le biais de la sélection officielle en compétition, hors compétition, la semaine de la critique, La Quinzaine des réalisateurs, la section Un certain regard, les séances spéciales et de minuit ... environ 200 chef-d'œuvres venant des 4 coins du monde pour combler tous nos sens durant 2 semaines... Pour ma part je suis un fan absolu de Woody Allen, Xavier Dolan ou Nicolas Winding Refn. J'avoue ne vouer aucun culte si ce n'est à Scorsese, Tarantino, Nolan, Kubrick, Spielberg, Fincher, Lynch, les Coen, les Dardennes, Jarmush, Von Trier, Van Sant, Farhadi, Chan-wook, Ritchie, Terrence Malick, Ridley Scott, Loach, Moretti, Sarentino, Villeneuve, Inaritu, Cameron, Coppola... et j'en passe et des meilleurs. Si vous me demandez quels sont les acteurs ou actrices que j'admire je vous répondrais simplement des "mecs" bien comme DiCaprio, Bale, Cooper, Cumberbacth, Fassbender, Hardy, Edgerton, Bridges, Gosling, Damon, Pitt, Clooney, Penn, Hanks, Dujardin, Cluzet, Schoenaerts, Kateb, Arestrup, Douglas, Firth, Day-Lewis, Denzel, Viggo, Goldman, Alan Arkins, Affleck, Withaker, Leto, Redford... .... Quant aux femmes j'admire la nouvelle génération comme Alicia Vikander, Brie Larson, Emma Stone, Jennifer Lawrence, Saoirse Ronan, Rooney Mara, Sara Forestier, Vimala Pons, Adèle Heanel... et la plus ancienne avec des Kate Winslet, Cate Blanchett, Marion' Cotillard, Juliette Binoche, Catherine Deneuve, Isabelle Huppert, Meryl Streep, Amy Adams, Viola Davis, Octavia Spencer, Nathalie Portman, Julianne Moore, Naomi Watts... .... Voilà pour mes choix, mes envies, mes désirs, mes choix dans ce qui constitue plus d'un tiers de ma vie : le cinéma ❤️

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