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CE QUI NOUS LIE

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Sur fond de terroir et de liens du sang, Cédric Klapisch nous sert l’un de ses meilleurs crus.

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Réalisateur : Cédric Klapisch
Acteurs : Pio Marmaï, François Civil, Ana Girardot
Genre : Comédie, Drame
Nationalité : Français
Distributeur : StudioCanal
Date de sortie : 14 juin 2017
Durée : 1h53mn

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Jean a quitté sa famille et sa Bourgogne natale il y a dix ans pour faire le tour du monde. En apprenant la mort imminente de son père, il revient dans la terre de son enfance. Il retrouve sa sœur, Juliette, et son frère, Jérémie. Leur père meurt juste avant le début des vendanges. En l’espace d’un an, au rythme des saisons qui s’enchaînent, ces 3 jeunes adultes vont retrouver ou réinventer leur fraternité, s’épanouissant et mûrissant en même temps que le vin qu’ils fabriquent.

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Réalisateur chaleureux adepte des comédies sociales, Cédric Klapisch nous a souvent proposé de judicieux portraits sur la nouvelle génération avec Le péril jeune ou L’auberge espagnole plus récemment mais nous a aussi régalé de belles tranches de vie avec Un air de famille. Délaissant l’esprit choral qui a marqué la plupart de ses films pour ne se consacrer qu’à une fratrie de trois personnages, Klapisch continue à s’intéresser à l’émancipation forcée que les événements de la vie vous forcent à prendre, à la transmission générationnelle et aux liens familiaux.

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Se souvenant que c’est son père qui l’a initié à la dégustation du vin, c’est au cœur des vignobles de Bourgogne (là où se concentrent essentiellement les petites exploitations familiales) qu’il choisit de planter le décor de cette chronique grave et tendre qui se déroule au rythme des quatre saisons, prétexte à établir un intéressant parallèle entre les cycles de la nature et l’évolution d’une famille. Pour ce retour à ses (nos) racines, il use de ses armes habituelles : sincérité et émotion additionnées d’un juste trait d’humour.

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Qu’il s’agisse de faire vivre ses personnages au rythme trépidant des mégapoles mondiales ou de les installer au cœur de nos vertes campagnes, Klapisch enrichit avec la même dextérité chacun de ses scénarios d’une infinité de détails minutieusement étudiés auxquels le spectateur peut s’identifier et qui donnent cette sensation qu’il y a un peu de nous dans cette histoire. Car si l’action avance lentement au bon vouloir de la nature et si le cadre de la Bourgogne, magnifiée par de chauds éclairages apporte son lot de sérénité, aucun des tracas du quotidien n’est occulté.

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Mêlant habilement, sous la forme de ce qui pourrait s’apparenter à un documentaire, la description poussée du travail exigeant de viticulteur (de la date du démarrage de la récolte à la mise en bouteilles) aux difficultés tant pécuniaires que sentimentales de ces trois jeunes gens face à cet héritage, le film nous abreuve sans jamais forcer le trait de bons moments de mélancolie, d’enthousiasme, de crédibilité et d’humour et nous attache aux personnages, modestes héros, résistant plutôt bien que mal aux aléas de la vie et incarnés avec brio par un trio de jeunes comédiens au talent incontestable.

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C’est le désormais incontournable Pio Marmaï qui se glisse dans la peau du fils aîné. Tiraillé entre sa vie désormais établie à des milliers de kilomètres de sa terre natale, son désir de régler ses comptes avec son père et ses devoirs de plus grand de la fratrie, il est le personnage-miroir de cette génération éternellement chère au réalisateur, peuplée de ceux qui se construisent dans le voyage mais aussi et surtout dans l’expérience humaine. Sa stature d’être authentique oscillant entre hésitation et virilité contribue largement à la crédibilité du récit. C’est pourtant Juliette (Ana Girardot) qui semble bien être le pivot de cette aventure familiale. Du vivant de son père, elle avait l’habitude de travailler au domaine qu’elle n’a jamais quitté. Toutes les décisions qui comptent passent par elle.

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Dans ce monde impitoyable d’hommes, la grâce d’Ana Girardot nourrit son personnage d’une fragilité vivifiante sans jamais démentir sa force émouvante. Quant à François Civil, (le petit frère Jérémie) récemment mis en valeur dans la série télévision Dix pour cent, c’est par lui que la légèreté arrive. Il est pourtant le moins bien doté. Empêtré dans des relations compliquées avec un beau-père autoritaire, il a peine à gagner son émancipation. Une discussion houleuse entre ces deux êtres diamétralement opposés constitue l’une des scènes les plus hilarantes du film.

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Nul doute que la l’ambiance chaleureuse et la simplicité bienveillante autour de ce thème universel de la transmission familiale iront droit au cœur des spectateurs et sauront les rassembler.

ENTRETIEN AVEC CEDRIC KLAPISCH ET L’EQUIPE DU FILM

 

Dans son nouveau film Cédric Klapisch file à la campagne pour faire les vendanges et parler de fraternité. Entretien.

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Avec ce film vous faites une escapade dans les caves ?
J’aime le vin et j’en bois de longue date. J’avais envie de tourner un film sur ce thème depuis une dizaine d’années. J’ai commencé en 2010 par faire une série de photos sur les vendanges, à appréhender le paysage au fil des saisons, à déguster, à rencontrer, à partager. Parler de la vigne, c’est parler d’écologie, de patrimoine, de culture, de famille, d’héritage, de politique, de mondialisation, de plaisir et d’intime aussi. Autant de bonnes raisons pour aller faire les vendanges en Bourgogne, du côté de Meursault et de Beaune.

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On vous connaissait comme un cinéaste des villes ?

J’ai beaucoup aimé la frénésie des villes, Barcelone, Paris, New York. Après cette trilogie urbaine et Casse tête chinois qui m’ont donné beaucoup de plaisir, j’avais envie de changer d’air, de travailler avec de nouveaux acteurs. Filmer la campagne, c’est appréhender le paysage, le cadre, les saisons, de manière apaisée. Ouvrir grand les yeux pour goûter simplement l’esprit des lieux, la rencontre. Je suis un cinéaste urbain. Cette fois, j’ai dû faire un vrai travail d’enquête pour comprendre, au-delà des idées reçues, le milieu, les gens, la tradition l’ouverture au monde, l’esprit de la vigne. Être un peu apaisé, filmer au gré des saisons, c’est bien non ?

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La famille, la terre, ce sont des termes politiquement connotés ?

Ce sont des valeurs qui n’appartiennent ni au Front national, ni à Pétain. Ce sont des valeurs universelles. Ce qui nous lie, c’est à la fois la tradition et l’ouverture au monde. Le voyage et l’ailleurs ne sont pas opposés à l’identité française. Bien au contraire. En mettant en scène ici deux frères et une sœur liés par un terroir, par une histoire, par un héritage difficile à assumer, je voulais parler de la fratrie mais aussi de la fraternité qui est une valeur républicaine essentielle.

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Comment les métamorphoses perpétuelles mais aussi cycliques de la nature sont-elles liées aux changements que subissent les personnages au cours de l’histoire ?
Cédric Klapisch : En fait, c’est un point de départ du scénario. Je regarde à la fois le parcours de cette famille et le trajet du raisin sur une année complète, et je les mets en parallèle. Il y a aussi eu de nombreux points de jonction entre cette nature changeante et les personnages. Au printemps par exemple, une histoire d’amour renaît, on repeint la maison, c’est un renouveau général ; la période de l’hiver est comme une salle d’attente où tout se fige, et les vendanges sont le point culminant de la vie dans toute sa force.
Ana Girardot : La relation s’est faite de manière organique : on a vu la nature changer et on s’est adaptés à elle. Cédric nous observait beaucoup, il a réécrit des scènes en fonction de nous, des apports à nos rôles respectifs.

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La place de la famille semble primordiale dans cette transformation : un retour aux racines est-il selon vous indispensable pour évoluer durablement ?

A.G. Il y avait une phrase dans le film qui n’y est plus, où un curé disait « Dans la vie, les parents veulent donner aux enfants des racines et des ailes ». Je pense qu’on a toujours besoin de se nourrir de là d’où on vient pour aller de l’avant.
C.K. Par rapport à Jean, on voit qu’il se réconcilie avec son enfance, son passé. Le film raconte à quel point il est important de régler ses comptes avec ses racines pour évoluer.
A.G. La famille, c’est comme un filet, une sécurité pour chaque pas que l’on fait dans la vie. Il y a quelques temps, j’ai fait une couverture pour un magazine, et j’avais super peur de la réaction de ma petite sœur, plutôt féministe. J’en ai parlé à mon père qui m’a dit oui, c’est vrai, ça ne va pas forcément lui plaire, mais de toute façon elle t’aime. Voilà ce à quoi renvoie la vision de la famille dans le film : un amour inconditionnel, qui dépasse les opinions personnelles.

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Comment fait-on un film centré sur des sens théoriquement invisibles tels que le goût et l’odorat ?
C.K. Ah ça, c’était un challenge ! La scène en gros plan des enfants qui goûtent des aliments avec les yeux bandés fait justement appel au rapport visuel entre les sens. Idem pour celle où la fratrie goûte le raisin : ce côté sensoriel, voire même sensuel, était indispensable. D’ailleurs, j’ai essayé de traiter la scène du couple qui fait l’amour exactement comme celle de la coupe du raisin, pour que tous les sens soient en éveil.
L’aspect contemplatif de certaines scènes semble vouloir nous pousser à réapprendre les choses simples telles que la relation à la nature, la famille encore une fois, mais aussi le sentiment d’appartenance.
C.K. Je ne parle pas vraiment de retour à la nature, mais plutôt d’un désir de simplicité, de revenir au concret dans un monde centré sur la virtualité : quelles sont les vraies valeurs, les vrais liens ? Pourquoi moi, qui suis très parisien, j’ai constamment besoin de retrouver cette nature.
A.G. Ce qui me touche particulièrement dans ce film, c’est la notion de pardon. Je réalise qu’en France, à la télévision, dans les téléréalités ou autres, il y a toujours ce besoin des participants de dire à leurs familles qu’ils les aiment. Ce problème de communication se retrouve dans le film entre Jean et son père : quelque chose les a empêchés de se dire combien ils s’aimaient et, du coup, ils ignorent à quel point ils sont, en fait, sur la même longueur d’ondes.

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Cinéphile depuis mon plus jeune âge, c'est à 8 ans que je suis allé voir mon 1er film en salle : Titanic de James Cameron. Pas étonnant que je sois fan de Léo et Kate Winslet... Je concède ne pas avoir le temps de regarder les séries TV bonne jouer aux jeux vidéos ... Je vois en moyenne 3 films/jour et je dois avouer un penchant pour le cinéma d'auteur et celui que l'on nomme "d'art et essai"... Le Festival de Cannes est mon oxygène. Il m'alimente, me cultive, me passionne, m'émerveille, me fait voyager, pleurer, rire, sourire, frissonner, aimer, détester, adorer, me passionner pour la vie, les gens et les cultures qui y sont représentées que ce soit par le biais de la sélection officielle en compétition, hors compétition, la semaine de la critique, La Quinzaine des réalisateurs, la section Un certain regard, les séances spéciales et de minuit ... environ 200 chef-d'œuvres venant des 4 coins du monde pour combler tous nos sens durant 2 semaines... Pour ma part je suis un fan absolu de Woody Allen, Xavier Dolan ou Nicolas Winding Refn. J'avoue ne vouer aucun culte si ce n'est à Scorsese, Tarantino, Nolan, Kubrick, Spielberg, Fincher, Lynch, les Coen, les Dardennes, Jarmush, Von Trier, Van Sant, Farhadi, Chan-wook, Ritchie, Terrence Malick, Ridley Scott, Loach, Moretti, Sarentino, Villeneuve, Inaritu, Cameron, Coppola... et j'en passe et des meilleurs. Si vous me demandez quels sont les acteurs ou actrices que j'admire je vous répondrais simplement des "mecs" bien comme DiCaprio, Bale, Cooper, Cumberbacth, Fassbender, Hardy, Edgerton, Bridges, Gosling, Damon, Pitt, Clooney, Penn, Hanks, Dujardin, Cluzet, Schoenaerts, Kateb, Arestrup, Douglas, Firth, Day-Lewis, Denzel, Viggo, Goldman, Alan Arkins, Affleck, Withaker, Leto, Redford... .... Quant aux femmes j'admire la nouvelle génération comme Alicia Vikander, Brie Larson, Emma Stone, Jennifer Lawrence, Saoirse Ronan, Rooney Mara, Sara Forestier, Vimala Pons, Adèle Heanel... et la plus ancienne avec des Kate Winslet, Cate Blanchett, Marion' Cotillard, Juliette Binoche, Catherine Deneuve, Isabelle Huppert, Meryl Streep, Amy Adams, Viola Davis, Octavia Spencer, Nathalie Portman, Julianne Moore, Naomi Watts... .... Voilà pour mes choix, mes envies, mes désirs, mes choix dans ce qui constitue plus d'un tiers de ma vie : le cinéma ❤️

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